"ETRE DE GAUCHE ET DE DROITE A LA FOIS" : C'ETAIT DE GAULLE !
« Il n’y a pas de gaullistes de gauche ni de droite. Etre gaulliste, c’est être de gauche et de droite à la fois, vous voyez ce que je veux dire, à la fois ! C’est être passionné et raisonnable, mais en même temps ! C’est être pour le mouvement et pour l’ordre, mais conjointement ! Il n’y a pas d’ordre qui tienne sans mouvement ; ni de mouvement qui tienne, sans ordre. Vouloir l’un sans l’autre, c’est un délire ! ».
Eh oui, ces propos rapportés fidèlement par Alain PEYREFITTE ont une tonalité familière bien que prononcés pourtant en 1963… Et si on voulait pousser un peu plus le raffinement, on pourrait citer d’autres paroles fortes qu’aimait particulièrement prononcer de Gaulle, telle que « La France en marche ». Eh oui.
Je ne doute pas qu’Emmanuel MACRON a lu « C’était de Gaulle » avant de se lancer dans l’aventure des élections présidentielles, ou ses conseillers, mais je pense plutôt qu’il a pris le soin lui-même de le faire. Comme d’autres ouvrages j’imagine, d’autres présidents.
L’important n’est pas là. De Gaulle lui-même a dû constater ensuite l’évolution mathématique de la Vème République, compte tenu du système électoral conçu pour l’élection présidentielle, notamment, vers une dualité entre une majorité et une opposition, et plus précisément la Droite et la Gauche. Celui qui incarnait la France à lui tout seul n’avait pas de remplaçant et n’en aura pas eu. Sans idéaliser le personnage, qui avait ses défauts et qui n’est pas exempt de critiques sur tel ou tel aspect de sa politique, il suffit de relire « C’était de Gaulle », par exemple, pour se convaincre si besoin était de la stature du personnage et de ce que lui doit la France.
Pour le reste, cinquante ans plus tard, comme je le disais, la Vème République a pris sa vitesse de croisière. Quel beau navire ! J’ai du mal à comprendre cette hystérie autour de ce clivage Droite / Gauche qui serait une horreur absolue pour notre vie démocratique. Qu’Emmanuel MACRON ait adopté ce positionnement car c’était le seul, tactiquement, susceptible de le propulser à la tête de l’Etat est une chose. Bien joué, l’artiste ! Que les médias traditionnellement de Gauche se soient engouffrés dans la brèche pour empêcher un candidat de Droite d’emporter les élections présidentielles, rien de nouveau sous le soleil. Mais maintenant, il faudrait revenir sur terre pour se demander si cela peut tenir lieu de stratégie durable.
Bien sûr, le Président de la République doit représenter la France et le peuple français, en n’étant donc ni de Droite, ni de Gauche. Mais la logique du jeu politique s’articule autour d’une majorité et d’une opposition, et dans la tradition française donc, d’une confrontation démocratique entre la Droite et la Gauche. Cela veut-il dire pour autant que ce doit être la guerre ? Non, bien entendu, et le travail législatif doit favoriser à la fois le rôle de contrôle attribué à l’opposition mais aussi l’apport technique qui peut être aussi le sien pour enrichir un texte. Cela veut-il dire que sur tel ou tel sujet il ne doit jamais y avoir convergence de vue ? Non, bien entendu. Dans la gestion d’une collectivité locale, pensez-vous que l’opposition soit toujours en désaccord avec les mesures proposées ? Non, bien entendu. Pourtant, la garantie que les élus au pouvoir ne dérivent pas relève bien de l’existence d’une opposition.
Les choses sont claires. En fait, elles le sont aussi sur le plan médiatique. Emmanuel MACRON reçoit le soutien de journalistes qui le manifeste en abondant dans le sens d’un clivage Droite / Gauche devenu délétère. Bien joué l’artiste ! En effet, pour se maintenir au pouvoir, il est désormais obligé de rester sur cette position « Et de Droite, et de Gauche » et de faire en sorte, en fait, de tout miser sur sa personne comme référent unique, voire apolitique. Ne soyons donc pas naïfs, ce stratagème a encore de beaux jours devant lui. Bien joué l’artiste !
Il n’en demeure pas moins que la recomposition aura nécessairement lieu un jour ou l’autre, avec une majorité dont le pouvoir sera contesté par une opposition. La question est de savoir qui saura acquérir l’image de l’opposant aux yeux des français et pour quelle alternative politique.
J’en profite pour tirer un enseignement qui s’impose dans mon esprit. En effet, je finissais par me dire qu’une dose de proportionnelle pour l’élection des députés serait sans doute nécessaire afin de favoriser la représentation de tous les courants politiques. Mais je dois avouer que le succès impressionnant des candidats de « La République en marche », le parti d’Emmanuel MACRON, tout juste créé, prouve bien que quand il y a une vraie dynamique, le système électoral ne peut empêcher un nouveau parti de s’imposer dans le paysage politique. Ainsi, les partis qui ne parviennent pas à être mieux représentés à l’Assemblée Nationale, notamment, doivent en tirer les conséquences… pour se mettre en ordre de marche en vue des prochaines échéances électorales, sans modifier le système actuel.
A suivre donc…
Patrick CLEMENT
Boulogne, le 16 novembre 2017