EMMANUEL MACRON, LE DERNIER AVATAR D'UNE PENSEE POLITIQUE ASPHYXIANTE !
J’ai résisté, je vous assure, j’ai résisté ! Mais à la lecture du discours d’Emmanuel MACRON prononcé à l’occasion de la commémoration de la Rafle du Vel d’Hiv et publié in extenso dans LE FIGARO, mes résolutions se sont envolées. Ce n’est pas tant la mise en cause de la France dans ce drame qui s’inscrit dans cette horreur absolue que fut la Shoah qui me fait réagir publiquement, que le fait d’affirmer de manière péremptoire que cette mise en cause de la France en tant que telle était La Vérité et qu’il n’y avait donc pas lieu de la contester sous peine de sombrer dans les affres de l’antisémitisme avec un rappel commode de la position de Marine LE PEN sur le sujet qui faisait désormais figure d’épouvantail.
Emmanuel MACRON, dans les pas de Jacques CHIRAC, de Nicolas SARKOZY et de François HOLLANDE, était donc à son tour dans son bon droit en la matière pour dire ce qu’était la vérité et dénier à autrui le droit de la contester. A quand une loi pour que cela devienne un délit… Je ne suis pas certain que c’est cela qu’attendent nos compatriotes juifs. Se souvenir de l’inénarrable pour dire « plus jamais ça », oui ! Prendre toutes les mesures pour que l’antisémitisme ne retrouve pas une nouvelle vigueur, sous d’autres formes et pour d’autres raisons aujourd’hui d’ailleurs, oui ! Accuser le gouvernement de Vichy d’avoir compté en son sein des partisans de la déportation (dois-je rappeler qu’un certain nombre de grandes figures du gouvernement de Vichy étaient issues des rangs socialistes, illustration d’une période bien troublée et plus complexe que certains ne voudraient le faire savoir…), oui ! Mais considérer que c’était la France qui était responsable en tant qu’Etat souverain de la Rafle du Vel d’Hiv, non, je n’en suis vraiment pas certain ! Et ceci pour une raison simple, c’est que l’examen objectif des faits prouve que le gouvernement de Vichy représentait certes l’Etat français mais dans un contexte tout à fait particulier et hors du droit commun, à savoir une France qui avait été battue et occupée par les allemands, et qui était soumise à une obligation de collaboration selon les termes mêmes de l’armistice qui avait été signée avec l’Allemagne. Tout historien pourra, mieux que moi, en faire la démonstration (et tout juriste ; étudiant en droit, notre professeur Jean Gicquel mettait la période de Vichy entre parenthèses…). Sans compter bien entendu le fait que des français revendiquaient la légitimité d’une autre France, la vraie France, refusant ainsi la défaite, et l’armistice justement, imposée à notre pays…
Si Charles de Gaulle, et même François MITTERRAND, qui ont vécu cette période, avec des parcours certes bien différents…, ont toujours voulu distinguer le gouvernement de Vichy de la France souveraine, c’est pour des raisons objectives et pas seulement pour une construction de l’histoire qui préserverait la dignité de la France au détriment de la vérité historique. A mon humble niveau, pour essayer de mieux faire comprendre mon positionnement en sortant d’un débat qui pourrait apparaître abstrait, voire abscons à certains, je me bornerai à tirer les conséquences de la position de nos chefs d’Etat qui n’ont en fait que repris cette nouvelle lecture proposée par un de leurs conseillers, un jour,… Est-ce la France souveraine qui a bâti le Mur de l’Atlantique pour empêcher les alliés de venir « délivrer » notre pays (je mets des guillemets à « délivrer » car si la France était souveraine, elle n’avait pas besoin d’être délivrée !) ? Est-ce la France souveraine qui a organisé le rationnement de sa population suite aux sommes versées à l’Allemagne, laquelle s’accaparait également les denrées alimentaires produites sur le territoire ? Est-ce la France souveraine qui a organisé le pillage de ses œuvres d’art envoyées en Allemagne ? Est-ce la France souveraine qui a organisé le STO en Allemagne (Service du Travail Obligatoire pour les français) ?... Inutile de continuer, vous avez compris. C’est tellement évident !
Ce n’est pas la France souveraine qui a organisé la Rafle du Vel d’Hiv mais le gouvernement de Vichy à la demande des allemands, et au premier chef Hitler. On pourrait consentir à parler de la « France de Vichy » pour bien qualifier la période et la qualité de France dégradée en termes d’attributs de souveraineté dont il est question, mais aller au-delà contredit la vérité historique. Sur les modalités de cette rafle et de cette politique menée par le gouvernement de Vichy, je laisse bien entendu les historiens nous éclairer pour mettre en évidence le rôle de chacun, notamment lorsque ce rôle n’a pas été que subi. Je laisse également les historiens nous rappeler quel a été le sort respectif des juifs selon les différents pays européens pour mieux évaluer la réalité vécue en France, dans toutes ses composantes.
Je me sens totalement solidaire de nos compatriotes juifs mais je revendique le droit d’avoir une opinion différente sur la mise en cause de la France considérée comme un Etat souverain entre la signature de l’armistice et la libération par les alliés de notre territoire occupé par les allemands. Je ne pense pas manquer de respect au devoir de mémoire qui s’impose à tous. Et au contraire, je regrette que cette « nouvelle vérité » vienne mettre un coin dans ce consensus qui nous unissait pour dénoncer la barbarie et œuvrer pour s’en prémunir. Et je n’ai pas peur comme je l’ai déjà écrit de dénoncer le fond d’antisémitisme qui régnait effectivement dans nos sociétés d’avant-guerre. Et là aussi les historiens sont les mieux placés désormais pour nous le remémorer. Comme je suis prêt à remonter aux origines de cet antisémitisme, ainsi que je l’ai écrit là-aussi, en puisant dans nos racines chrétiennes puisqu’il a fallu du temps pour reconnaître et affirmer haut et fort que Jésus était juif et avait inscrit son parcours dans la religion juive tout en dénonçant notamment ces fameux docteurs de la Loi qui considéraient qu’ils étaient les seuls à pouvoir interpréter la vérité de la religion. Déjà…
Au-delà de cette prise de position, je voudrais dire clairement et plus généralement que je suis inquiet pour la démocratie dans mon pays. Emmanuel MACRON, pour ne citer que lui puisqu’il est le dernier à s’engager dans cette voie mais avec encore plus d’intolérance encore dans ce fameux discours, il faut bien le mentionner, se targue d’avoir des notions de philosophie. Mais qu’est-ce qu’une société dans laquelle l’Etat imposerait une vérité officielle qui ne souffrirait plus aucune contestation, aucun débat. N’est-ce pas là même nier la notion d’altérité que de refuser à autrui la possibilité de faire état de son point de vue, de sa vérité. Quel monde nous réservez-vous ? George Orwell avait-il donc bien anticipé ? Ainsi que j’ai tenté de l’exprimer dans mon petit opuscule sur « Les Sens de la Vie », notre civilisation ne pourra progresser dans cette recherche de la Vérité et dans cette marche en avant du monde que si nous préservons les conditions de la liberté de penser et d’expression pour employer des termes facilement compréhensibles. N’asphyxions pas la démocratie ! L’excommunication, religieuse ou laïque, de celui qui ne pense pas comme vous ne me semble pas aller dans le bon sens…
Ressaisissez-vous ! Tous ! Avant qu’il ne soit trop tard…
Patrick CLEMENT
Boulogne, le 23 juillet 2017