DU VAGUE A L’AME
La vérité est parfois douloureuse. Autant dire que cette journée de recueillement m’a donné du vague à l’âme hier. Doublement en fait.
D’une part, j’ai été surpris, il faut bien l’avouer, par cette ferveur populaire qui témoigne effectivement d’un mouvement de fond contre le terrorisme islamiste tel qu’il s’est manifesté dans notre pays la semaine dernière. C’est tellement réconfortant de voir communier tous ensemble ces français, et au-delà dans de nombreux pays, tous ceux qui se sentent concernés par cette barbarie. Alors, oui, bien que suivant ces manifestations devant ma télévision, j’ai été touché par cet élan.
Mais, d’autre part, ce vague à l’âme qui se traduisait également par le sentiment d’être en porte-à-faux résultait du fait que mon engagement m’empêchait de profiter pleinement de cette journée de deuil. Tout simplement parce que, comme je l’ai expliqué, les politiques qui pleuraient aujourd’hui étaient coupables selon moi d’avoir favorisé les conditions de cette explosion de violence. Evidemment, ils n’étaient pas coupables directement des actes perpétrés par ces islamistes manipulés par des forces nuisibles mais, je le répète, ils sont responsables de l’affaiblissement de la défense de nos valeurs qui fondent notre civilisation ce qui a facilité la propagation de ces idées nocives.
Pour ce qui me concerne, Charlie hebdo avait un positionnement politique qui ne me convenait pas mais, au nom de la liberté d’expression, hier, nous étions tous « Charlie » pour reprendre le slogan de la foule, et j’espère que si Minute, par exemple, avait subi une telle attaque meurtrière, la ferveur populaire aurait été identique. Et j'espère également que cette liberté d’expression unanimement revendiquée hier sera défendue désormais par ceux qui la remettaient en cause dès que les opinions exprimées ne leur convenaient pas…
Frédéric MITTERRAND, ancien ministre de la culture de Nicolas SARKOZY, m’a aidé dès hier à redescendre de mon nuage par ses propos tendancieux qui témoignaient que, derrière la façade de l’unanimité de l’émotion des responsables politiques, se cachaient des arrière-pensées qui allaient bien vite animer le débat qui nous attend. Ainsi, louant le caractère multiculturel de la foule, il s’est permis de fustiger le caractère monocolore des manifestants de la Manif pour tous. Tout était dit. Bravo M. MITTERRAND… Et merci.
J’avais donc raison de me sentir en porte-à-faux. Cette liesse populaire formidable et sincère abritait bien tous ceux que je combattais. Ils étaient bien là, avec leurs petites arrière-pensées.
Alors, après cet hommage de la Nation rendu de manière fantastique hier à ceux qui sont morts, journalistes, policiers, juifs, simplement parce que juifs, tués par des fanatiques islamistes, le temps du débat doit reprendre pour qu’ils ne soient pas morts pour rien.
Nous jugerons nos responsables politiques aux actes. Attention à ce que le peuple ne finisse pas lui aussi par les juger coupables !
Patrick CLEMENT
Boulogne, le 12 janvier 2015